Le Liban est le plus occidental des pays orientaux. C’est un caractère qui peut être trompeur, car s’il facilite les premiers contacts, il peut aussi, par une trop grande confiance en-soi pousser à commettre des erreurs, voire des fautes.
Un climat des affaires encore handicapé par l’instabilité politique
La culture libanaise rassemble un pays pourtant divisé, par la politique, par l’histoire, par la religion (18 + les quelques sans religion), par la géographie, le niveau de vie, les sexes. La cuisine est une des principales composantes de la culture au Liban. Il en va de même pour le patriotisme (le drapeau libanais est omniprésent) ou la révérence envers l’armée ou la religion. Mais c’est aussi un pays où les murs sont tenaces. La place de la religion est essentielle, et sa manifeste continuellement. Un statut personnel s’y attache. On n’y renonce pas. La politique est dirigée par des clans féodaux qui remontent parfois à plusieurs décennies, voire à deux ou trois siècles. Leur village vote selon la religion de la majorité de ses habitants, pour la même famille. Le bureau de vote reste toujours celui du village du Liban dont est originaire le père, et le père de son père…. La mémoire de l’individu est donc celle de son clan. Et certains occidentaux pensent que les Libanais ne sont pas vraiment libres.
La place essentielle de la famille
On comprend donc la place essentielle de la famille, autour de qui tout se fait, et dont chacun recherche l’assentiment. Les familles se groupent par villages et par quartiers, les personnes âgées restent à la maison. Les mariages entre cousins germains ont longtemps été très nombreux. Ces caractères sont moins forts à Beyrouth.
Le Liban, une cordialité typique des pays du Proche-Orient
Malgré ces divisions, les Libanais sont extrêmement cordiaux. On appellera facilement quelqu’un « habibi » (« chéri »), nom plutôt affectueux et courant, mais dont un chauffeur de taxi peut affubler son client en lui rendant la monnaie. La prise de distance est donc impensable. Le tutoiement est courant en arabe. Cela semble faciliter les contacts. Le vouvoiement, qui n’est pas naturel, manifesterait une distance probablement mal ressentie par l’interlocuteur libanais. Toutefois, il ne faut pas chercher à attribuer une signification à cette cordialité naturelle. Elle ne préjuge de rien, et surtout pas de la sincérité, ni de la profondeur des engagements ou des relations. La rudesse des rapports interpersonnels que l’on constate dans l’espace public n’a pas non plus de signification particulière. La politesse est rare. En revanche, elle est essentielle dans la famille, et dans les affaires.
Les relations hommes femmes
La question des relations entre les sexes est sensible. Les hommes dirigent la vie politique et la société. Les pères transmettent à leurs enfants leur nom, leur religion et leur nationalité. Les femmes sont plus passives. Elles doivent être respectées. Leur première vocation est de se marier et d’avoir des enfants. Le développement personnel et professionnel est une exigence nouvelle. Une femme célibataire peut être bannie de la société.
Savoir interpréter le langage corporel
Le langage du corps est extrêmement important. Si les femmes peuvent être, entre elles, très proches physiquement, un homme ne peut se tenir trop près d’une femme, on ne doit pas lui tendre la main le premier. Certaines femmes musulmanes refusent de serrer la main des hommes, prudence donc à la vue du premier hijab et d’un possible faux pas. Un homme ne doit pas se trouver dans une maison seul avec une femme. Les visites impromptues peuvent donc être gênantes. Cet interdit n’existe pas au bureau. En revanche, les hommes peuvent être physiquement très proches, s’embrasser, se toucher. On ne doit pas y voir de connotations sexuelles. D’autant plus que les rapports sexuels entre personnes du même sexe sont réprimés par la loi. Mais les choses commencent à changer. Enfin, point important, les marques de courtoisie dont on veut faire preuve sont les mêmes, qu’il s’agisse de les manifester envers des hommes ou des femmes.
L’importance du premier contact au Liban
Il s’entend évidemment qu’on pardonnera plus facilement à un étranger qu’à un Libanais des erreurs de comportement.
Comme partout, les premiers contacts sont essentiels. A l’aéroport Rafic Hariri de Beyrouth, lien essentiel du monde avec le Liban, les rapports seront déjà plus ouverts qu’ils pourraient l’être en France. On pourra employer quelques mots arabes. Les formules de salutation sont innombrables et les Libanais seront très sensibles et cette attention. L’arabe est une langue difficile (peu de Français la maitrisent), et le français apparaît assez naturellement, avant même l’anglais, comme la langue d’échange. La place de l’anglais progresse toutefois rapidement. Est-ce une preuve de la perte d’influence des chrétiens maronites, très liés à la culture française depuis le XIXème siècle et au Mandat de la SDN (1920-1943)?
Sans formalisme, on pourra demander au voyageur français, non seulement s’il a fait bon voyage, mais si le passager d’à côté n’était pas trop ennuyeux. On parlera probablement de la famille, des enfants, qu’il faut, bien entendu, adorer. On ne demandera pas tout de suite le montant du salaire de son interlocuteur, mais cela ne saurait tarder. En revanche, PAS UN MOT sur la religion de son interlocuteur, que l’on peut devenir facilement par le nom, ou le village d’origine de la famille. Cela serait extrêmement discourtois.
La France, une place à part dans le coeur des Libanais
Il faut toujours avoir à l’esprit que la France a toujours soutenu le Liban dans ses pires épreuves, et notamment durant la guerre civile. Les Libanais y sont extrêmement sensibles et font peut-être preuve de plus d’affection apparente envers les Français qu’envers d’autres étrangers.
Il n’y a pas de code vestimentaire formel au Liban. La cravate est rare, sauf usage de la profession ou de l’entreprise. Les Libanais invitent facilement les visiteurs, au restaurant, pour leur faire goûter cette merveilleuse cuisine. Ils peuvent également vous inviter chez eux, pour découvrir un environnement plus intime. Dans ce dernier cas, on pourra – ou non – apporter des cadeaux. Il faut éviter les fleurs, réservées aux amoureux. On optera plutôt pour des cigares, des gâteaux, quelque chose de rare ou d’original. Pourquoi pas un parfum ? L’omniprésence de la contrefaçon permettra aux hôtes de s’assurer de leur origine.
Le rituel du repas
Faut-il se resservir ? Ce n’est pas indispensable au restaurant, c’est nécessaire dans le cas d’une invitation familiale. Il faut faire honneur à la maîtresse de maison qui a probablement préparé le repas, avec ses bonnes (c’est parfois une nécessité, et souvent une marque de standing). Le rituel est toujours le même. On propose au visiteur de se resservir, il refuse une première fois, on lui demande une deuxième fois et alors, il peut apporter librement la réponse qu’il souhaite. A noter, on fume beaucoup, aussi bien les hommes que les femmes.
En famille ou au travail, les tabous seront les mêmes. On ne parlera ni de religion, ni de politique, ni d’Israël, pas trop de sexe. La religion est le pire des terrains minés. Demander d’où vient une personne est déjà sensible : on connaîtra alors très probablement, sans poser directement la question, la religion et l’orientation politique de son interlocuteur. Mais c’est un point à connaître : les coreligionnaires négocient parfois de la même façon.
Le pouvoir du « gentleman agreement »
Les négociations sont beaucoup moins argumentées qu’elles peuvent l’être en France. On se focalisera sur ce qui est important : le prix, la marque, la qualité, selon le contexte. Elles sont souvent très âpres. Depuis les Phéniciens, les Libanais se conduisent comme un peuple de commerçants, et cela marque profondément leur identité. Les accords sont rarement formalisés, c’est une marque de confiance. Attention toutefois : les Libanais sont souvent en contact avec la diaspora. Ils ont parfois vécu à l’étranger et ont de plus en plus d’expérience à l’international. En conséquence, ils ont de plus en plus tendance à s’imprégner d’autres modes de pensée et de fonctionnement, notamment américains.
Il n’en demeure pas moins que la France peut parfaitement répondre aux différents besoins et attentes des Libanais. De l’agroalimentaire à la santé en passant par l’environnement ou le transport, nombreuses sont les possibilités de coopération pour les entreprises françaises. La France est ainsi le quatrième fournisseur du Liban. Rappelons également le projet de coopération décentralisé entre Beyrouth et l’Ile de France, et des projets qui devraient voir le jour. On parle ainsi de la mise en place d’un réseau d’incubateurs francophones et de soutien à des startups, ou encore la mise à disposition de savoir-faire en matière de ville durable, d’urbanisme, d’aménagement des espaces (source MOCI).
Le Liban: des opportunités d’affaires
Les managers ont beaucoup à faire dans le pays du Cèdre. Comprendre et intégrer les composantes interculturelles de ce magnifique pays reste une priorité pour optimiser la négociation. C’est un sésame pour décrocher des contrats.
Par Didier Mulet
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